Monsieur Leonhard, en tant que futurologue, vous connaissez aussi le passé. Pouvez-vous nous dire ce qui a changé depuis la création de Careerplus il y a 20 ans?
(Eclat de rire.) En fait, presque tout. La technologie a automatisé de nombreux métiers. Prenons la digitalisation: elle nous permet aujourd’hui de trouver plus facilement les informations, c’est pourquoi par exemple nous avons besoin de moins de documentalistes. Par ailleurs, les progrès techniques ont évolué de manière exponentielle ces dernières années. La réalité de certaines choses aujourd’hui était encore hier de la science-fiction.
Donnez-nous des exemples!
Citons la traduction automatique qui va bientôt faire sa grande percée, non pas pour les textes complexes, mais pour les contenus simples. Autre exemple, les call-centers: d’ici dix ans, nous pourrons réduire les quelque centaines de millions d’employés qui travaillent dans ces centres à 50 000. Car les robots vont maîtriser la reconnaissance du langage. Les métiers de comptable ou d’analyste financier seront également de moins en moins exercés par des personnes. Dans les hôpitaux, on verra dans le futur des logiciels intelligents détecter les premiers signes d’une pathologie et indiquer la suite du processus de traitement.
Quelles conséquences pour nous?
Ces développements que nous considérions encore comme de la pure théorie il y a cinq ans se sont tous transformés en réalité en une seule fois! De ce fait, de nombreux nouveaux métiers apparaîtront ces dix prochaines années, tout comme d’autres disparaîtront.
Quelles évolutions techniques nous attendent concrètement?
La construction du progrès technique repose sur cinq piliers: tout d’abord la digitalisation – de la musique, du film, de la télévision, des livres. Puis l’automatisation: est-elle une bonne chose? Les avis divergent. Ce qui est clair, c’est qu’elle augmente radicalement l’efficience en entreprise: moins de personnel, moins de dépenses, plus de productivité. La virtualisation représente le troisième pilier. Ici, nous pouvons citer l’exemple du cloud computing – le travail dans un nuage de données. Autrefois, le collaborateur exécutait la plupart des tâches sur son lieu de travail. On arrive au quatrième pilier, appelé «désintermédiation», à savoir la suppression des intermédiaires dans un circuit de distribution. Par exemple, de plus en plus d’auteurs distribuent leurs livres directement sur Amazon, ou de plus en plus de clients réservent leur hôtel sur TripAdvisor. Finalement, la robotisation constitue le cinquième et dernier pilier de ce progrès technique.
Cette évolution représente-t-elle pour nous un avantage ou un inconvénient?
Pour chaque tendance précitée, on peut constater de très importants avantages comme l’augmentation de l’efficience, l’internationalisation, la meilleure relation à la clientèle, la rapidité dans la communication. L’inconvénient comporte un aveu que l’homme doit s’arracher à lui-même: il y a des tâches que les machines font mieux que lui, voire qui le dépassent.
Serons-nous alors totalement remplacés par des robots?
Oui, l’évolution va dans cette direction. Mais il existe des domaines où cela prendra beaucoup de temps. Un robot, par exemple, ne va pas remplacer de si tôt un artisan. Si le métier d’installateur sanitaire ne semble pas si compliqué de prime abord, il semble encore moins probable qu’une machine puisse exécuter la réparation d’une canalisation complexe. Pour un avocat, la question est tout autre: s’il doit vérifier si un cas similaire s’est produit dans le passé, un logiciel peut très bien le faire à sa place.
De tels pronostics sont un peu inquiétants.
Je crois qu’en fin de compte, ce ne sera pas une réalité menaçante, du moins pas en ce qui concerne la Suisse, car nous avons ici très peu d’emplois qui sont complètement répétitifs ou automatisés.
Quels métiers seront remplacés? Quels métiers ont un futur? Doit-on placer des garde-fous face à l’évolution de la technique? Ne manquez pas toutes les réponses dans une semaine dans la partie 2 de cet entretien passionnant avec Gerd Leonhard.
La suite prochainement…
Conseiller en futurologie
Avec Gerd Leonhard, entraînez-vous au futur! Souhaitez-vous connaître aujourd’hui les tendances du futur ainsi que vos succès potentiels futurs? Gerd Leonhard – originaire de Bâle – aide les entreprises, les organisations et les institutions à reconnaître leurs futurs domaines d’activité et leur explique comment les exploiter. Parmi ses clients, on compte des acteurs internationaux tels qu’Universal Studios, BBC, Microsoft, IBM, la Commission européenne et des PME suisses.
Aujourd’hui âgé de 53 ans, Gerd Leonhard fait partie des leaders mondiaux en conseil du futur. Ses services incluent le consulting stratégique dans les secteurs de la technologie, du marketing, de la publicité, de la télécommunication, de la culture, du tourisme, du service bancaire, du commerce, du développement durable, ainsi que dans le conseil en médias et leurs business modèles du futur. Par ailleurs, il est sollicité en tant que sparring-partner et coach pour CEO. Il est connu – dans un contexte où entreprises et dirigeants doivent relever des défis complexes – pour ses présentations et analyses provocatrices et inspirantes.
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