Que nous réserve l’avenir en matière de recrutement? Et le collaborateur, quand démissionnera-t-il? Pour recueillir de telles informations, il n’est guère nécessaire d’observer les étoiles ni d’interroger sa boule de cristal. Ce sont plutôt les données massives qu’il faut consulter. L’analyse des données RH, tel est le nom de cette toute jeune discipline qui, à la lumière du big data, permet de prédire les événements à venir avec toujours plus d’exactitude.
En RH comme en recrutement, le domaine du controlling devient de plus en plus important. D’énormes quantités de données sont même collectées grâce à l’analyse des données RH, sur la base desquelles il est possible de dégager des modèles capables de livrer des renseignements sur les entreprises et le comportement humain. Cela fait déjà un bon bout de temps que le marketing et les ventes analysent les données afin d’identifier des corrélations méconnues, les tendances du marché voire les préférences de leurs clients. Partant, certaines entreprises ont étendu la démarche à leur politique RH. Ainsi les attentes personnelles des candidats et des collaborateurs, leurs comportements, besoins et désirs, ainsi que les tendances du secteur et l’évolution du marché du travail peuvent-ils se révéler intéressants pour les RH et le recrutement. Les responsables RH utilisent de plus en plus les données comme critère de décision rationnel.
Dans l’univers des données: une définition du big data
On entend par big data la collecte et l’analyse de grandes quantités de données issues de sources diverses. Dans les domaines des RH et du recrutement, il peut s’agir de données structurées ou non structurées telles que les entretiens et évaluations des collaborateurs, les données salariales ainsi que celles en ligne extraites du processus de recrutement.
A quel point le «big data» est-il «big»? Les chiffres sont hallucinants: en 2018, 2 500 000 000 000 000 000 bytes (soit 2,5 trillions) de données ont été créés chaque jour (étude Domo). D’ici 2025, on estime que cette quantité de données devrait passer à 463 exabytes par jour dans le monde. Cela correspond à 212 765 957 DVD quotidiens. Quel gâchis ce serait de ne pas utiliser cette source d’information. Rares sont les secteurs qui ne tentent pas d’extraire de précieuses informations de ce big data.
Le big data dans les RH et le recrutement
En ressources humaines, les utilisations possibles du big data sont nombreuses et variées. Des entreprises américaines, dont Google, Walmart et IBM, utilisent déjà des logiciels RH intelligents capables de prévoir à quel moment un service a besoin de quels collaborateurs, parmi quelles équipes la satisfaction est trop faible ou encore si certains collaborateurs envisagent de quitter l’entreprise. Ces connaissances permettent aux entreprises de réagir à temps.
En ce qui concerne le recrutement, la question pourrait être la suivante: quel type de profil et quels traits de caractère doit avoir un collaborateur qui s’intègre bien dans l’équipe et compte y rester un certain temps? Si, par exemple, l’analyse des données montre que la plupart des collaborateurs qui ont un long trajet domicile-travail à effectuer quittent rapidement l’entreprise, cela pourrait être pris en compte dans la décision. L’analyse des données accessibles sur Internet peut également contribuer à dresser le portrait global d’un candidat, et ce, avant même qu’il n’ait passé son premier entretien. Il existe en effet des logiciels intelligents capables d’extraire des informations pertinentes à partir du flux des données. Les profils sur les réseaux sociaux comme LinkedIn, les activités associatives, les orientations politiques, mais aussi les comportements en ligne tels que les préférences d’achat et de lecture servent notamment de sources. Attention toutefois: prudence est généralement de mise lors de la collecte de données. Leur traitement et leur utilisation relèvent de la protection des données et les nombreuses exigences légales afférentes doivent être impérativement clarifiées dès le début.
Autre champ d’application du big data dans le recrutement: la publication d’offres d’emploi. Sur la base d’analyses de données, les recruteurs appréhendent de mieux en mieux les comportements de recherche et les besoins de leurs candidats. Cela permet par exemple d’activer des annonces là où sont susceptibles de se trouver les candidats potentiels. La communication peut en outre être adaptée aux habitudes du groupe-cible.
Les limites de l’intelligence artificielle
Se borner à collecter des données ne sert pas à grand-chose. Afin que celles-ci soient pertinentes, elles doivent d’une part être accessibles et d’autre part, contextualisées. Il est donc nécessaire d’adopter une stratégie concrète et de définir un nombre de chiffres clés, sans quoi le flux de données risque d’être illisible (voici comment mettre en place un controlling réussi).
Et même si le potentiel du big data dans les RH et le recrutement est loin d’être épuisé et que le baromètre des tendances grimpe en flèche, l’intelligence artificielle atteindra toujours ses limites: surtout dans les secteurs souffrant d’une pénurie de travailleurs qualifiés, les candidats souhaitent davantage être démarchés. Il est essentiel, dans ce contexte, d’entretenir un contact personnel et professionnel. De plus, les machines n’éprouvent encore aucune empathie ni intelligence émotionnelle. Seul un être humain est en mesure d’évaluer si une personne s’intégrera bien dans une équipe ou si l’alchimie est au rendez-vous. Sans oublier que certains talents ne disposant pas d’un CV linéaire rédigé avec les mots-clés idoines risquent de passer à travers les mailles du filet.
Conclusion: les machines collectent et analysent les données, alors que les personnes les interprètent et les évaluent. In fine, c’est le bon sens qui compte, pas les chiffres bruts.