Careerplus: Madame Grube, pourquoi le controlling est-il important dans le recrutement?
Fiona-Sophie Grube: Sur le fond, le controlling pose les questions suivantes: sommes-nous efficaces? Que pouvons-nous améliorer? Et comment pouvons-nous l’améliorer? Si je peux répondre à ces trois points, je suis sur la bonne voie. Il permet en outre de détecter les tendances futures et d’effectuer une veille stratégique des activités de recrutement.
A l’avenir, la mesure gagnera-t-elle en importance dans le processus de recrutement?
Aujourd’hui, être rapide est devenu crucial. A l’époque de la méthode «publie et prie», on publiait une offre d’emploi et on ne pouvait que patienter. Grâce à la numérisation, il existe aujourd’hui bien plus de canaux qui sont plus diversifiés et que nous pouvons contrôler avec beaucoup plus de précision. En contrepartie, nous devons surveiller et vérifier l’efficacité des canaux et des mesures choisies. Il faut également noter que dans un marché de l’emploi axé sur les travailleurs, la satisfaction des candidats joue un rôle toujours plus important, et celle-ci peut également être mesurée.
Quels conseils donneriez-vous aux novices du controlling?
Le plus important: fixez-vous des objectifs compréhensibles et clairs. Qu’est-ce que vous souhaitez mesurer exactement? Réalisez également un état des lieux. C’est la seule manière d’obtenir des valeurs comparatives à partir desquelles des conclusions peuvent être tirées. Deuxièmement: en fonction des objectifs, choisissez des indicateurs clés performance (KPIs, Key Performance Indicators) avec lesquelles vous pourrez effectuer des mesures. Définissez clairement ces KPIs dès le départ. Par exemple, avec le KPI «temps d’embauche», vous devez indiquer clairement si vous effectuez une mesure en jours ou en semaines. Le troisième point important: vous n’obtiendrez des valeurs de comparaison significatives que si la définition des données reste la même. Vérifiez la valeur ajoutée et la pertinence des KPIs au bout de six mois à un an. Vous constaterez peut-être qu’il vous manque quelque chose à un certain point ou qu’un KPI n’apporte que peu d’informations pertinentes. Vous pourrez alors ajouter un nouveau KPI et en supprimer un autre.
Que recommandez-vous aux entreprises dont les moyens et les ressources sont limités?
Mon conseil personnel aux PME: ne réinventez pas la roue. Examinez d’abord: quelles données peuvent être collectées sans trop de ressources supplémentaires? Peut-être que votre système de gestion des candidats vous livre déjà des données utiles. Il existe également des plateformes de bonne qualité pour le reporting en ligne. Le plus simple reste toutefois de se fier à ses propres données.
Comment puis-je trouver les bons KPIs pour mon entreprise?
Cela est très individuel et dépend des objectifs et des moyens de l’entreprise. Au fil du temps, on apprend ce qui est pertinent pour l’entreprise et ce qui l’est moins. Après tout, tout ne doit pas être gravé dans le marbre dès le départ. Les KPIs de base sont le temps d’embauche (Time-to-hire), le coût par embauche (Cost-per-hire), la source du recrutement (Source-of-hire) – c’est-à-dire par quels canaux ou actions les candidatures sont reçues – ainsi que la satisfaction de tous les participants avec le processus de recrutement et la qualité du nouveau collaborateur. En ce qui concerne le dernier indicateur, le plus simple est de le collecter via le taux de réussite par période d’essai.
Quelles sont les plus grosses erreurs en matière de controlling?
Une mesure trop unidimensionnelle. Les KPIs impliquent l’acceptation d’une certaine abstraction. C’est pourquoi il est important d’adopter des perspectives différentes. Il convient de prendre en compte au moins trois dimensions sur quatre. Premièrement: la qualité du recrutement. Avons-nous la bonne personne au bon endroit? Deuxièmement: la vitesse. Combien de temps faut-il pour pourvoir un poste? Troisièmement: le processus est-il efficace? Et quatrièmement: les coûts sont-ils appropriés? Mesurer uniquement la vitesse serait trop simpliste. Un processus de recrutement plus rapide n’en est pas pour autant meilleur.
Le seul fait de collecter des données n’est pas suffisant. Comment parvient-on à une interprétation?
Les données ne prennent tout leur sens que lorsqu’elles sont mises en perspective. Les valeurs comparatives peuvent être des objectifs définis personnellement ou des critères de référence tirés du marché. S’il est habituel dans un certain secteur d’activité d’inviter environ quatre candidats pour l’entretien d’embauche, mais qu’une entreprise en convoque dix, il lui serait bénéfique de revoir l’ensemble du processus. Les objectifs ou les critères de référence doivent être clairs dès le départ. En outre, les données doivent être collectées et évaluées régulièrement.
Les recruteurs font encore preuve d’une certaine réticence à l’égard du controlling. Comment expliquez-vous cela?
Dans le cadre de ma fonction, j’observe parfois que les entreprises définissent des KPIs qui leur sont difficiles à collecter d’un point de vue technique. Si le nombre de KPIs est trop élevé et que l’évaluation est très complexe, les recruteurs perdent tout intérêt. Ils sont alors davantage frustrés que motivés. Une autre erreur de taille: ne pas parvenir à accepter le changement. Les changements peuvent être source d’inquiétudes. Il est donc important d’impliquer les recruteurs et de leur faire comprendre qu’il ne s’agit pas de contrôler leur travail, mais plutôt de travailler ensemble pour obtenir de meilleurs résultats.